Le pénultième article, ou comment vivre en harmonie dans la nature

Publié le par hoequateur

Salut tout le monde !


J’entends d’ici la pensée qui traverse votre esprit en ce moment même: serait-ce le retour de fantômes n’ayant pas pris la plume (que dis-je, le clavier) depuis des semaines ? Eh bien oui, nous revoilà pour un baroud d’honneur que j’ai le privilège de réaliser pour mes compagnons de fortune. Allez, vous pouvez l’avouer maintenant, on vous avait manqué.
D’abord, nous vous devons une explication pour ce silence radio. Figurez-vous que ces dernières semaines ont été tellement riches en évènements et en émotions que nous n’avons pas  pu écrire une seule petite ligne. Mais je m’en vais réparer cette injustice en vous contant nos ultimes aventures  équatoriennes. Et, afin que ce soit digeste pour vous, je vous offre, non pas un article mais deux ! (oui je pense à votre bien-être lorsque vous lirez nos  envolées lyriques)

 

 

Je me lance donc. Où en étions-nous ? A une mélodie shuar venue de la forêt amazonienne poser ses notes au micro d’un studio de Puyo, me semble-t-il. Concrètement cela veut dire que toute la famille de Francisco et Maria s’est attelée à la réalisation d’un cd de musique traditionnelle shuar. Nous vous avions montré les débuts de cette entreprise dans notre dernier article. Actuellement, l’enregistrement se poursuit. Chaque morceau nécessite de la patience, afin qu’il soit absolument parfait et prêt à être inscrit sur un cd. Nous attendons donc tranquillement l’envoi des morceaux au fur et à mesure de leur achèvement jusqu’à nous, c’est-à-dire en France.

 


 « Heuu attends stop là ! Vous êtes en France ? » Hé hé oui, j’aime les surprises du chef en plein milieu d’article. Remarque, vous aviez peut être fait le calcul. Nous sommes presque mi-août, nous étions arrivés en Equateur début juin…Les deux mois se sont écoulés et nous avons dû rentrer en France. Mais je vous raconterais en détail dans l’ultime article les derniers moments de notre aventure. Pour le moment, je continue à vous parler du projet.

 

 

Oui parce qu’il y a deux facettes dans ce projet, dont une qui nous a amené en plein dans la forêt, en compagnie de Maria et Francisco. Je ne sais pas si vous vous rappelez, mais Hoé soutient aussi le développement d’une communauté nommée Putuim où vit Ramon, le frère de Maria, avec ses deux femmes et ses…18 enfants !! Autant vous dire que pour un match de foot ils ne manquent pas de joueurs, chose que nous avons testée avec joie. Mais avant il a fallu atteindre Putuim. On pourrait se dire : « Rien de plus simple, tu suis Maria dans la forêt et au 103e arbre tu tournes à gauche et t’y es ». Point du tout chers amis ! Vous commettriez là une grave erreur en pensant innocemment que le chemin est tout tracé. Nous avons d’abord pris un bus en direction de Macas autour de 4h du matin. Le problème c’est qu’il fallait descendre bien avant Macas et que nous dormions tous ! Le réveil fut donc pénible. Enfin, il en faut bien plus pour entamer le zen équatorien. Nous avons donc repris sereinement un bus dans l’autre sens pour, cette fois, nous arrêter au bon endroit. De là, nous avons attendu une bonne demi-heure avant de voir arriver ce…véhicule :

 

 

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L'essoreuse à salade

 

 

Le fait est qu’après presque 5 mois de péripéties diverses et variées en Amérique du Sud, peu de choses peuvent encore nous surprendre. C’était sans compter sur cette limousine tout confort aux portes qui ferment parfaitement. Après une bonne demi-heure à bord de notre bolide, nous voilà à Pablo Sexto, village relai vers les communautés alentour. Le temps de saluer une trentaine de shuars réunis autour du maire pour fêter son élection récente, de ne rien comprendre aux conversations multiples autour de nous, de manger sur le pouce du fromage, des bananes grillées et de boire un café, et c’est reparti pour un tour…en bus. Celui-ci nous mène joyeusement à mi-chemin de notre destination et…s’arrête pour nous laisser descendre. En effet, pour rallier Namakim, communauté proche de Putuim, la suite du voyage se fait en 4x4 à 12 à l’arrière. Il se trouve que la municipalité inaugurait une nouvelle route pour Namakim. Nous avons donc eu l’honneur de nous faire secouer sur une route toute neuve. Et enfin, Namakim. De là, quelques 30 minutes de marche sur un chemin en plein soleil où la protection solaire la plus efficace demeure les bottes sur la tête :


 

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Sous les bottes, Maria

 

 

Puis, on prend un petit chemin sur la gauche (vous voyez, c’est bien sur la gauche à la fin). Celui-ci, tout frais de la boue préparée avec soin par la pluie de la veille, mène en une quarantaine de minutes à Putuim. Inutile de préciser qu’il faut un certain équilibre pour ne pas s’enfoncer définitivement dans la boue derrière Maria qui galope sereinement pieds nus vers notre objectif. Et, por fin (en espagnol dans le texte),  Putuim ! Vous comprenez mieux pourquoi on est parti à 4h du matin de Puyo…


 

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L'arrivée à Putuim

 

 

Nous avons donc rencontré Ramon et toute sa (petite) famille dans un cadre absolument idyllique. Loin de tout, cette petite communauté jouit d’une tranquillité inégalable. En revanche, l’inconvénient d’une vie en pleine forêt est que la communauté souffre de certains manques non négligeables. D’où l’apport d’Hoé et donc notre présence au milieu de nulle part.



En deux jours, nous avons pu prendre part au mode de vie shuar, certes modifié depuis des décennies, mais toujours authentique. La répartition des tâches pourrait nous paraître, en tant qu’européens, très machiste. Les femmes de Ramon sont en effet chargées de faire la cuisine, s’occuper des enfants et faire la lessive dans le fleuve. En réalité, il n’en est rien. L’organisation de la vie en société est juste très bien cloisonnée entre femmes et hommes, et chaque sexe a son importance dans la réalisation des tâches quotidiennes. L’homme s’occupe globalement de tâches physiques, telles la coupe du bois. Chaque femme possède sa petite ferme, équivalent du jardin chez nous, où elle plante et récolte toutes sortes de féculents et plantes. Cette séparation des tâches nous a valu le refus catégorique d’Alexandra (16 ans!!!), la fille de Francisco, à Puyo, quand nous proposions de l’aider pour la cuisine. Cette anecdote démontre à quel point il est normal en Equateur  que seules les femmes fassent la cuisine. En France, cette tradition tend à disparaître pour un rééquilibre des tâches entre l’homme et la femme. Tout jugement sur le sujet sera inévitablement imprégné de la culture de chacun, et je crois qu’il n’y a pas de meilleur système qu’un autre (oui j’anticipe car je vois venir d’ici les blagues machistes les plus communes sur le sujet). C’est un exemple, selon moi, très illustratif de ce qu’est l’interculturel.

Sur la culture et les traditions indiennes, si cela vous intéresse d’en savoir plus, je peux vous suggérer un ouvrages instructif sur le sujet grâce à la petite étoile qui va venir se placer au niveau de l’ultime mot de cette phrase* (c’est-y pas magique).

 

 

Bon revenons à nos moutons forestiers. Il est difficile de tout conter dans un article, aussi vais-je vous parler du projet en soi. Après une nuit démarrée à 19h (il n’y a plus de lumière à partir de 18h environ), plus ou moins bonne selon la qualité du lit (hein Julien), nous sommes partis de bon matin voir l’élevage de la communauté situé à une demi-heure de marche. Putuim possède actuellement 2 vaches : 1 adulte qui se remet d’une maladie, et 1 génisse. L’intérêt de posséder des vaches est de pouvoir donner du lait aux enfants de la communauté (avec quelques bananes c’est excellent pour la croissance et l’équilibre protéique), et de produire du fromage vendu ensuite en ville. En plus de ces 2 vaches, Putuim possède en commun avec une autre communauté proche 7 chevaux. Parmi ces 7 chevaux, on compte deux poulains achetés au cours de l’année. L’équipe Hoé 2011 avait acheté 2 porcs pour constituer un élevage, le nombre de porcelets par portée étant élevé (une dizaine en moyenne). Malheureusement, une épidémie dans la région a obligé Ramon à vendre ces 2 porcs,  malades par conséquent, avant qu’ils ne rendent l’âme. Ils ont reçu en échange les 2 poulains dont je vous parlais plus haut. Les chevaux sont utilisés pour réaliser divers travaux, agricoles principalement. Ils peuvent être loués aux voisins de la communauté et apporter ainsi un revenu.



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Et une génisse en pleine forme, une!

 

 

A partir ce constat initial, nous avons réfléchi aux besoins actuels de Putuim. Il nous est apparu évident que les enfants souffraient de carences en protéines (ventres très ronds), problème récurrent pour cette communauté. Nous avons donc pensé avec Ramon que l’apport de lait serait bénéfique, et par conséquent, qu’il fallait relancer l’élevage bovin. La vache adulte, récupérant doucement d’une maladie, n’est actuellement pas en mesure de produire beaucoup de lait. Nous avons donc décidé d’acheter une nouvelle génisse du même âge que celle déjà présente. D’ici 4 mois, elles pourront toutes les deux êtres montées par un taureau loué à un voisin. Elles produiront ainsi du lait pour la communauté qui sera en partie donné aux enfants et en partie utilisé pour faire du fromage vendu en ville. Enfin, la génisse que nous avons vue n’est pas vaccinée. Nous finançons donc aussi sa vaccination pour éviter une nouvelle épidémie. La nouvelle génisse est vendue vaccinée. Le financement par Hoé du projet dans son ensemble s’élève à  900 dollars. 

 

 

Voilà, vous savez tout ! Nous avons passé un très bon moment à Putuim avec toute la famille. Et puis nous avons pris le chemin du retour avec Francisco et Maria. A part le chemin boueux comme à l’aller, le retour fut bien plus simple puisque nous reprîmes un bus sur le chemin menant à Namakim qui nous mena à la route où un autre bus nous ramena directement à Puyo (après un gros arrêt « refroidissement du moteur » qui nous fit douter).

 

 

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Ramon (le monsieur avec le fusil), ses deux femmes (entourant Maria en rose),

et toute la famille (ou presque)


 

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Un (petit) foot sur le terrain de Putuim

 

 

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Vue de Putuim (c'est-y pas beau)

 

 

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Autre vue de Putuim (c'est-y pas...Francisco qui se promène?)

 

 

Allez, pause. C’en est fini pour cet article. Allez-vous chercher un café, un thé ou un verre de rhum avant de lire l’ultime article (snif !), vous l’avez bien mérité. A dans quelques minutes.
 

 

* Les lances du crépuscule, Philippe Descola : sur les Ashuars et non sur les Shuars mais ces deux cultures sont proches donc très intéressant à lire

 

 

C.V.

Publié dans Projet 2012

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