Agua y arboles
Vendredi soir 21h, le président Correa annonce à la télévision l’annulation du projet Yasuni ITT, soit selon lui « la décision la plus difficile que son gouvernement ait dû prendre » : le site protégé du parc national Yasuni va finalement être cédé à l’exploitation pétrolière sur 1 pour mille de sa surface… Devant l’écran de télévision, Judith (amie Huaorani de Maria et Francisco), attristée par cette nouvelle nous dit que nous serons les derniers volontaires d’Hoé à voir ce territoire vierge de l’exploitation pétrolière. En effet, la communauté dans laquelle nous nous apprêtons à partir se trouve à la lisière du site de Yasuni et au centre de la future exploitation.
Nous partirons sans Judith et Maria qui doivent dès le lendemain se rendre à Quito pour traduire l’intervention présidentielle du programme ECORAE mis en place par le gouvernement. Maria travaille depuis 2 ans en tant que traductrice shuar pour cet organisme qui vise au développement de l’Amazonie et dont le siège se situe à Puyo. Chaque semaine le président Correa se rend dans des villes aux quatre coins du pays afin d’évaluer l’avancement économique et infrastructurel des territoires recevant l’aide de ce programme (notamment les plus pauvres et reculés). Les longs discours qu’il y fait sont à chaque fois traduits et diffusés à la radio dans quasiment toutes les langues indigènes équatoriennes (Shuar, Ashuar, Quichua, Huaorani, etc.).
A minuit nous partons enfin avec Francisco et les danseurs de son groupe pour prendre le bus qui nous emmènera à Coca. Après 5 heures de trajet chaotique (le gouvernement n’a visiblement pas encore aménagé cette route !), nous arrivons à l’embarcadère au petit matin. Quelques heures d’attente plus tard, nous montons dans une pirogue à moteur accompagnés d’autres groupes de danses qui se rendent également à l’évènement. Au total ce sont environ 60 personnes qui sont attendues.
Nous descendons le fleuve Napo durant 5 heures contemplant la forêt tel le héros de Apocalypse now… Au bout du voyage, ce ne sont pas des « tribus sanguinaires » terrées au fin fond de la forêt qui nous attendent, mais une communauté en cours d’urbanisation au vu des nombreux édifices bétonnés que nous apercevons.
La communauté de Tiputini bénéficie en effet depuis quelques années du soutien très actif de l’ECORAE. : une école, un commissariat, un gymnase, une mairie et une piscine municipale sont sortis de terre, et bientôt une piste d’atterrissage qui reliera la communauté à Coca en 20 minutes ! Si nous bénéficions de belles chambres réservées aux visiteurs, nous croisons sur le chemin les logements bien plus précaires des habitants. Tous les paradoxes du développement des communautés en Amazonie nous apparaissent peu à peu.
Le soir venu, les groupes de danse se succèdent, ce sont des troupes professionnelles qui exécutent leurs chorégraphies inspirées de leurs cultures traditionnelles respectives. Enfin pour clore la « noche cultural », Francisco Ecuador entre en scène pour 1 heure de show caliente.
Le lendemain matin, nous partons dès 8 heures de cette communauté qui semble bien partie pour devenir l’avant poste de la nouvelle zone d’exploitation pétrolière décrétée par le président Correa.
De retour à Puyo tard dans la nuit nous nous écroulons de fatigue après cette longue escapade amazonienne. Dès demain nous retournons voir la casa avant de partir mardi pour la communauté de Putuim où nous devrions passer 3 jours.
Hasta luego a todos.
Antoine & Marie
